L’innovation (toujours) hors-la-loi

Selon Radio-Canada, « Carney veut le pouvoir de contourner les lois fédérales au nom de l’« innovation » ». (article ici)

Ayant écrit un livre intitulé L’innovation hors-la-loi (Bruylant, 2022), j’ai cru à une blague en lisant cette nouvelle. Je ne pensais pas qu’un gouvernement s’inscrivant dans l’État de droit pouvait balayer une des sources du droit d’un revers de la main en octroyant un pouvoir discrétionnaire aux ministres sur la base fumeuse de « l’intérêt national ». Le « droit à la carte », voilà le nouveau créneau du gouvernement canadien. Une loi ne vous plaît pas ? Aucun problème : écartons-la pour « stimuler l’innovation, la compétitivité ou la croissance économique ».

Cette approche n’est pas du néolibéralisme, mais bien du libéralisme pur et dur, c’est-à-dire un retrait de l’État du marché. Au contraire, avec les mêmes objectifs (innovation et croissance), le néolibéralisme aurait misé sur l’interventionnisme juridique de l’État, par exemple en s’assurant que la loi encourage le progrès. Le néolibéralisme est un réformisme, comme le soulignait justement Foucault.

En bilan, cela confirme à la fois ma thèse dans L’innovation hors-la-loi tout en démontrant la capacité du libéralisme classique à suivre son propre agenda. Ici, on peut bien parler de « dérégulation ». Et, contrairement à une idée reçue, le néolibéralisme, ce n’est pas la dérégulation.

Benjamin Lehaire

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