Le numéro 2016, 50-3 de la réputée Revue juridique Thémis de l’Université de Montréal vient de paraître. Ce numéro spécial est consacré à « La conformité en entreprises: perspectives canadienne et internationale ».
Le sujet de la compliance est à la mode. Ce numéro est donc le bienvenue, d’autant qu’il est, à notre connaissance, la seule parution francophone canadienne à s’intéresser à ce sujet.
Mon étude porte sur la juridicité des programmes de conformité en droit de la concurrence.
En voici le résumé :
La compliance est à l’honneur en droit des affaires depuis les années 2000. Le droit de la concurrence est un des domaines de prédilection de la conformité dans l’entreprise. Les risques liés aux amendes sont devenus tels que toute entreprise doit se doter d’un programme de conformité en droit de la concurrence. Le Canada ne fait à ce titre pas exception. Le Bureau de la concurrence a publié en 2015 une documentation visant à inciter les entreprises à introduire des programmes de conformité crédible et efficace en matière de concurrence. Cependant, la question se pose de l’interaction de ces directives administratives avec le droit criminel. Notamment, les entreprises sont tenues responsables des actes criminels commis par leurs cadres supérieurs depuis le projet de loi C-45 de 2003 Dans la récente affaire Pétroles Global, les tribunaux ont été amenés à se prononcer pour la première fois sur la responsabilité pénale des organisations en droit de la concurrence et sur l’impact d’un programme de conformité sur la peine de l’entreprise. Cet article propose d’étudier la juridicité donnée par les institutions administratives et judiciaires du Canada à ces programmes et de savoir si l’incitation administrative du Bureau de la concurrence à se conformer à la Loi peut être prise en compte lors de l’établissement de la responsabilité criminelle de l’organisation ou au stade de la fixation de la peine. Il propose de reconnaître une exonération de responsabilité fondée sur la présence d’un programme de conformité crédible et efficace dans l’entreprise contrevenante. En effet, une étude littérale de l’article 22.2 C.crim. permet de mettre fin à certains enseignements de l’arrêt Canadian Dredge Co. et ainsi inciter les entreprises à mettre en œuvre des programmes de conformité pour démontrer qu’il ne s’agit pas que d’un instrument de gestion des risques, mais au contraire, d’un instrument doué d’une véritable juridicité.
Benjamin Lehaire