Et si l’action de groupe était un outil de conformité à la loi ?

Pour mes collègues français qui s’intéressent à l’action collective en droit de la consommation, je vous réfère, dans une perspective comparatiste et critique, à cette décision de la Cour supérieure du Québec contre l’entreprise de livraison de repas à domicile Doordash Canada. Les faits sont assez simples : la représentante du groupe se plaint que le prix payé ne correspond pas au prix affiché, ce qui est contraire à la Loi sur la protection du consommateur du Québec, art. 224,  par. c). :

224. Aucun commerçant, fabricant ou publicitaire ne peut, par quelque moyen que ce soit:

(…)

c)  exiger pour un bien ou un service un prix supérieur à celui qui est annoncé.

Il ne s’agit ni d’un jugement d’autorisation de l’action collective, ni d’un jugement sur le fond de l’affaire, mais d’un jugement sur une demande d’autorisation de deux actions collectives aux fins de règlement et d’approbation des avis aux membres. La décision vous permettra donc de lire, en français, comment fonctionnent au Québec une entente de règlement et son approbation par le juge dans un contentieux de droit de la consommation.

On peut aussi citer une décision rendu par le même juge et avec le même représentant du groupe : Leung c. Uber Canada inc.

Quelques remarques pour alimenter vos réflexions :

  • Le modèle d’action collective avec une phase d’autorisation ou de filtrage fonctionne très bien pour parvenir à un règlement rapide avec les entreprises accusées par le groupe. Le pragmatisme doit primer dans l’action de groupe sur toute autre considération. Ce qui compte, c’est la mise en conformité de l’entreprise avec la loi.
  • Il montre son efficacité normative puisque l’entreprise s’est conformée sans tarder, avant toute intervention d’un tribunal sur le caractère fautif de l’acte, bien que le règlement se fasse sans reconnaissance de responsabilité
  • La réparation n’est pas le but recherché, mais bien plutôt la fonction normative, voire punitive de l’action. Dans cette affaire, les consommateurs, membres du groupe, recevront un crédit échangeable de 1,50 $… On a vu mieux comme réparation !
  • Le rôle du juge est capital pour assurer le sérieux de la procédure civile d’action de groupe. On remarquera que le tribunal orchestre la demande de règlement convenue entre les parties. Le secret de l’efficacité de l’action de groupe est donc dans l’organisation de la procédure et dans la prépondérance du juge au sein de la procédure.

Benjamin Lehaire, LL. D.

Les commentaires sont fermés.

Créez un site ou un blog sur WordPress.com

Retour en haut ↑