Le Bureau de la concurrence refuse de collaborer avec les parties privées dans le cadre d’un recours collectif

Le 20 novembre, le Bureau de la concurrence du Canada a publié un avis sur les Demandes de renseignements présentées par des parties privées dans le cadre d’actions aux termes de l’article 36 de la Loi sur la concurrence, c’est-à-dire les demandes des victimes de pratiques anticoncurrentielles qui cherchent, dans le cadre d’une action collective, à étoffer leur preuve en allant frapper à la porte de l’enquêteur payé par le contribuable canadien. L’institution fédérale est claire : les victimes se verront opposer une fin de non-recevoir. Les arguments, nous les connaissons, ils sont les mêmes partout dans le monde. Il y en a deux principaux :

  • Coûts exorbitants associés à la collecte de la preuve pour les parties privées
  • Atteinte à la confidentialité exigeait par les programmes de clémence et d’immunité

Le Bureau invoquera systématiquement le privilège de l’intérêt public signifiant que la demande d’informations de la part des parties privées porterait atteinte in fine à l’intérêt public. Tout en reconnaissant le rôle des recours privés pour l’application de la Loi sur la concurrence et la dissuasion, il demeure que les parties privées ne peuvent exciper de l’article 29 de la Loi le droit de demander la communication d’une information confidentielle. En effet, cet article dispose :

Il est interdit à quiconque exerce ou a exercé des fonctions dans le cadre de l’application ou du contrôle d’application de la présente loi de communiquer ou de permettre que soient communiqués à une autre personne, sauf à un organisme canadien chargé du contrôle d’application de la loi ou dans le cadre de l’application ou du contrôle d’application de la présente loi :

a) l’identité d’une personne de qui des renseignements ont été obtenus en application de la présente loi;

b) l’un quelconque des renseignements obtenus en application de l’article 11, 15, 16 ou 114;

c) quoi que ce soit concernant la question de savoir si un avis a été donné ou si des renseignements ont été fournis conformément à l’article 114 à l’égard d’une transaction proposée;

d) tout renseignement obtenu d’une personne qui demande un certificat conformément à l’article 102;

e) des renseignements fournis volontairement dans le cadre de la présente loi.

Le centre du débat est sur l’exception « du contrôle d’application de la présente loi », qui ne fait pas référence expressément à une autorité publique contrairement la première exception « un organisme canadien chargé du contrôle d’application de la loi ». Les parties privées y ont vu la possibilité de se définir comme des personnes assurant le contrôle d’application de la Loi. Cette vision a été rejetée et c’est l’analyse que l’on peut faire en lisant attentivement la décision General Motors de la Cour suprême de 1989 dans laquelle elle établit le rôle accessoire de l’article 36 dans le système répressif de la loi.

Pour aller plus loin, voir ma thèse L’action privée en droit des pratiques anticoncurrentielles : pour un recours effectif des entreprises et des consommateurs en droits français et canadien, Cowansville, éditions Yvon Blais, 2016, p. 220 et suiv.

Benjamin Lehaire

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